A mon amie, Suzanne Kala Lobè

Tu n’as pas pu achever la relecture de mon manuscrit. J’attendais ton regard franc, cette étincelle qui transformait tout en vérité. J’espérais que tu éclaires mes petites histoires de ton génie et de ta parole sans concession. Tu aurais, comme toujours, bousculé mes certitudes, forcé mes doutes à se dévoiler. Dans ce monde rongé par l’hypocrisie, tu m’as appris à être moi. Et toi, tu savais si bien être toi. Alors, pour toi, j’écris sans masque, avec mes fautes, mes ratures et ce ‘‘Zéro Macabo’’ que tu me reprochais en riant. Que ces mots apportent un souffle d’énergie à ceux qui veillent là-haut : toi, ma sœur, et Papa — celui qui, un 11 septembre, m’a révélé la morsure de la perte. Ces lignes lui sont dédiées, elles aussi, tirées de mes tiroirs en ce même jour de septembre. J’ai essayé, comme lui, de raconter. Mais je n’aurai jamais ce don : il savait faire naître le rire, il portait en lui ce fou rire contagieux, et surtout, il savait offrir des histoires qui réchauffaient l’âme.  J’espère qu’enfin, vous avez trouvé la paix. Vous me manquez.

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L’impossible préface
Écrire, c’est tenter de saisir l’insaisissable : des instants de vie, des colères, des rires, des blessures et de petites victoires. Mémoires de Créatif n’est pas seulement un recueil d’histoires personnelles, c’est une traversée : celle d’un esprit hanté par le besoin de créer, marqué par des rencontres improbables, des désillusions, mais aussi par l’étincelle d’un imaginaire qui ne s’éteint jamais. Le lecteur ne trouvera pas ici un récit linéaire, mais des fragments de vie, des éclats de vérité. Des couloirs de studios aux taxis des villes, des villages oubliés aux capitales enfiévrées, chaque scène dévoile un mélange d’humour et de douleur, de sarcasme et de sincérité. Derrière chaque rire, une blessure.

Derrière chaque blessure, une soif de créer. Ces mémoires racontent l’enfance ballottée par les affectations d’un père fonctionnaire, les premières fascinations pour les livres et les images, mais aussi la découverte brutale de l’injustice et de la mort. Ils évoquent les années d’apprentissage, les illusions et désillusions du métier, les excès des artistes, et surtout ce pouvoir unique de la création : transformer l’ordinaire en extraordinaire, inventer un langage pour dire l’indicible. À travers ces pages apparaissent des visages oubliés, des figures marquantes, des fragments d’amitié et d’amour, des instants de révolte et de tendresse. Le style est vif, coloré, parfois cru, toujours sincère. C’est la voix d’un créatif qui n’a jamais cessé de chercher et de réinventer, même quand le monde semblait se refermer sur lui. Mémoires de Créatif est à la fois un héritage et un manifeste : héritage d’une enfance, d’un métier, d’un pays plein de contradictions ; manifeste pour ceux qui croient encore que créer, c’est survivre.

Au lecteur qui ouvre ces pages : ne cherche pas la perfection d’un roman ni la distance d’un essai. Cherche une voix, un souffle, l’empreinte d’un homme en lutte avec ses mots, ses images, sa société — et surtout avec lui-même. Peut-être y verras-tu ton propre reflet. Armand-Thierry Nguélé M.